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Les politiciens français : est-ce que c’était mieux avant ?

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Dernière mise à jour : 27 avril 2025

Le Général-de-Gaulle debout dans sa voiture présidentielle noire, lors d'un déplacement à Isles-sur-Suippe dans le département de La Marne le 22 avril 1963.

Devant le nombre d’affaires dévoilées au public et liées à nos politiciens, on peut naturellement se poser la question de savoir si nos dirigeants étaient, ou non, plus intègres auparavant. Emplois fictifs, financements frauduleux, détournements d’argent, prises illégales d’intérêt, abus de biens sociaux, le 21ème siècle n’aura jamais autant senti mauvais en politique. Certes avant, les réseaux sociaux n’existaient pas mais la presse impartiale constituait un véritable quatrième pouvoir, aujourd’hui disparu. Alors la politique, est-ce que c’était mieux avant ?

Le temps du général De Gaulle : rigueur et sobriété

À l’époque du général De Gaulle (1959-1969), la fonction politique en France était perçue avant tout comme un service rendu à la Nation. L’homme du 18 juin incarnait une certaine idée de la République : celle où l’exemplarité était une exigence morale. De Gaulle, par exemple, payait lui-même ses factures d’électricité à l’Élysée, une pratique qu’il imposa strictement à son entourage. Son salaire de président était relativement modeste et ses dépenses personnelles étaient, dans la mesure du possible, séparées des frais de l’État.

Son épouse, Yvonne de Gaulle, avait acheté avec son argent personnel la vaisselle nécessaire à son couple et sa famille pour leurs repas à l’Élysée, auprès du magasin Le Bon Marché, afin de ne pas abimer la vaisselle officielle de l’Élysée. Le Général quant à lui, payait ses timbres, ses frais de téléphone privé, les goûters de ses petits-enfants, les frais d’essence pour se rendre à Colombey-les-Deux-Eglises et surtout : il ne voulait aucun passe-droit pour ses enfants et neveux.

C’est ainsi que le journaliste sportif Jacques Vendroux, ex-directeur des sports à Radio France et petit-neveu du Général de Gaulle (son grand-père était le frère d’Yvonne de Gaulle), s’est retrouvé militaire en Guyane, à la place d’une affectation prévue à Paris. Tonton Charles ne rigolait pas sur les passe-droits !

Les avantages matériels existaient déjà : voiture de fonction, logement de fonction, mais ils étaient utilisés avec mesure. Il n’était pas question d’utiliser les moyens publics pour des voyages privés ou de cumuler des indemnités extravagantes.

Abus ? Très peu recensés à l’époque gaullienne, car De Gaulle incarnait l’austérité et la distance vis-à-vis du luxe personnel.

Années 70-80 : l’entrée dans la modernité… et les premiers dérapages

Avec la modernisation de l’État sous Georges Pompidou puis Valéry Giscard d’Estaing, les avantages se sont progressivement “institutionnalisés”. Voitures de fonction, logements somptueux, frais de bouche, voyages officiels parfois transformés en voyages privés : le train de vie des ministres et hauts fonctionnaires commence à faire parler.

Exemples marquants :

Valéry Giscard d’Estaing a été vivement critiqué pour avoir reçu en cadeau plusieurs diamants de Jean-Bedel Bokassa, dictateur centrafricain, en 1973. Cette “affaire des diamants” sortira en 1979 via Le Canard Enchaîné et nuira considérablement à son image.

Raymond Barre, Premier ministre de 1976 à 1981, cumulait plusieurs retraites très confortables après sa carrière politique, montrant déjà un certain décalage entre la classe politique et les Français moyens.

Années 90-2000 : cumuls, privilèges et déconnexion

À mesure que la technocratie montait en puissance, les avantages accordés aux élus se multipliaient :

Cumul des mandats : de nombreux élus occupaient simultanément plusieurs fonctions (député, maire, président de conseil régional…), touchant autant d’indemnités que de postes.

Retraites dorées : un député pouvait obtenir une pension à vie après seulement 5 ans de mandat, bien plus avantageuse que la retraite des Français.

Exemples célèbres :

Jacques Chirac, maire de Paris de 1977 à 1995, a été condamné en 2011 pour “emplois fictifs” : plusieurs dizaines de salariés payés par la mairie sans véritable poste, dans le but d’alimenter son réseau politique. Le préjudice estimé : plus d’1 million d’euros.

Alain Juppé, alors maire de Bordeaux, a également été condamné en 2004 dans une affaire liée aux emplois fictifs du RPR. Le même Alain Juppé a bénéficié entre 1990 et 1995 d’un logement de 181 M² de la ville de Paris, au tarif réduit de 1 900 euros par mois. Son fils bénéficiait également d’un appartement de la ville de Paris, dans lequel 168 000 euros de travaux avaient été réalisés.

Jérôme Cahuzac, ministre délégué au budget déclare le 8 février 2013, sur RMC face à Jean-Jacques Bourdin : “Je n’ai pas, je n’ai jamais eu de compte en Suisse, à aucun moment, et la réponse apportée aux autorités françaises par la Suisse, permettra, je l’espère, très vite, et le plus vite serait le mieux, d’en finir, avec ces saletés.” Il sera condamné en 2018 à 4 ans de prison, dont 2 avec sursis, qui se transformeront à la maison avec un bracelet électronique. Il avait bel et bien et ce, depuis 1992, un compte UBS ouvert en Suisse.

Hervé Gaymard : 600 M² payés par l’Etat. Le Canard enchaîné révélait en février 2005 que le ministre de l’Économie occupait, avec sa femme et leurs 8 enfants, un logement duplex de 600 M² dans le 8ème arrondissement parisien. Montant du loyer : 14 400 euros, payés par l’État. Le hic, c’est que le ministre de l’Économie, pas économe sur l’argent des autres, possédait déjà un appartement de 200 M² à Saint-Michel, différents biens en province, était assujetti à l’ISF et avait simplement refusé son logement de fonction à Bercy. Cet abus amènera Hervé Gaymard à démissionner de ses fonctions le 25 février 2005. C’est à partir de ce cas révélé que les règles sur les logements de fonction des ministres de la République seront modifiées, à la demande de Jean-Pierre Raffarin, le premier ministre. Un ministre possédant déjà un logement dans la capitale n’aura pas droit à un appartement de fonction et la surface sera limitée : 80 M² + 20 M² par enfant.

Sans parler des nombreux cas de politiciens disposant de logements HLM dans la capitale, que certains refusent d’ailleurs de quitter sur le fait que, ça n’est pas interdit par la loi. Mais messieurs et mesdames grassement rémunérés, que faites-vous de l’exemplarité ? De la déontologie ? Parce qu’au-delà des bons plans dont vous bénéficiez, il y a la question des Parisiens qui attendent, depuis des années, l’attribution d’un logement social.

Aujourd’hui : encadrement accru, mais dérives persistantes

Depuis les années 2010, sous la pression de la crise financière et de l’opinion publique, plusieurs réformes ont été engagées :

Suppression du cumul des mandats (2017) : un parlementaire ne peut plus être maire ou président de collectivité locale.

Indemnités mieux encadrées : les députés ont désormais une enveloppe de frais plus contrôlée et doivent justifier leurs dépenses.

Transparence : la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (créée en 2013) oblige les élus à déclarer leur patrimoine.

Cependant, les abus n’ont pas disparu :

François Fillon, candidat à la présidentielle 2017, a vu sa carrière brisée par l’affaire dite des “emplois fictifs” de son épouse Penelope : elle aurait perçu environ 680 000 euros pour un emploi d’attachée parlementaire peu justifié.

Christian Estrosi, maire de Nice, a été critiqué pour avoir dépensé 400 000 euros d’argent public en voyages, hôtels et réceptions en 2018.

Emmanuel Macron a été épinglé pour certaines dépenses de maquillage : environ 26 000 euros en trois mois en 2017. Affaire révélée par l’hebdomadaire Le Point. En même temps, le coiffeur de François Hollande était payé 10 000 euros bruts par mois et sa maquilleuse : 6 000 euros par mois.

Christine Engrand députée RN du Pas-de-Calais a été caftée par Mediapart fin 2024. La récente élue se serait mélangé les pinceaux entre sa carte bancaire personnelle et celle du boulot. C’est ballot et c’est ainsi qu’elle a réglé l’abonnement mensuel d’un site de rencontres avec les pépètes de l’Assemblée nationale (39,99 euros par mois), la garde de ses chiens Smoothie et Chouchou (plusieurs milliers d’euros entre 2022 et 2023) et quelques 5 971,94 euros de frais d’obsèques. Pour rappel, un député perçoit un salaire de 7 637 euros bruts par mois, auxquels sont ajoutés 5 950 euros de frais uniquement réservés aux dépenses parlementaires. Soit un total net d’environ 11 500 euros, l’équivalent de 8 Smic. Une paie qui permet tout de même de régler la garde de ses chiens.

Et une fois de plus où en est l’exemplarité dans tout ça ? Au-delà du mépris engendré vis-à-vis des salariés lambdas au travers d’abus de ce type, se pose le problème de l’exemplarité. Comment être intègre si les décideurs du pays eux, ne le sont pas ?

Une intégrité inexistante chez certains, tels que l’ex-député LREM Benjamin Griveaux qui, malgré le fait qu’elles n’aient rien d’illégal, avait envoyé des vidéos de masturbation à une femme qu’il avait fréquenté. Où est l’exemple ? Où est la droiture ? Un dérapage qui amènera le candidat à la mairie de Paris à démissionner de sa candidature dès le lendemain de la révélation de l’affaire.

Alors, c’était mieux avant ?

En termes de rigueur morale, incontestablement oui : à l’époque de De Gaulle, la sobriété était une norme personnelle et politique. Les abus existaient très peu, et les politiciens de haut rang se savaient sous le regard sévère de l’Histoire.

Mais en termes d’avantages matériels, c’était moins encadré : il n’existait pas d’instances comme aujourd’hui pour vérifier et sanctionner les abus. Si des écarts avaient eu lieu, ils auraient été plus difficiles à détecter.

Aujourd’hui, les avantages sont plus nombreux, mais ils sont mieux surveillés. Pourtant, les scandales continuent de surgir, preuve que l’esprit de responsabilité n’est pas universellement partagé. Phénomène surprenant quand on sait le nombre de politiciens qui se réclament, aujourd’hui, du Général-de-Gaulle. Mais plutôt que de s’en réclamer, ne feraient-ils pas mieux de s’inspirer de sa probité morale ?

En résumé :

• Moins d’abus quantitatifs sous De Gaulle, mais moins de contrôles.
• Plus d’abus qualitatifs aujourd’hui, malgré plus de règles.
• Une vigilance citoyenne et médiatique devenue essentielle pour éviter les dérives.

Crédit photo : le Général-de-Gaulle de retour d'un déplacement dans La Marne - 22 avril 1963 - Isles-sur-Suippe - Licence Creative Commons©
Philippe Pillon

Créateur de MonsieurVintage, Philippe est un passionné de belles mécaniques, de voyages et d’objets qui ont une âme. À travers son regard, chaque moto, voiture ou destination raconte une histoire, dans une quête d’authenticité et d’élégance intemporelle.

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