Rivers of Babylon : du psaume biblique au tube planétaire de Boney M.
Il est des chansons qui traversent les décennies sans jamais perdre leur force émotionnelle. Rivers of Babylon en fait partie. Derrière ce refrain entêtant et cette mélodie faussement légère se cache une histoire bien plus ancienne que le disco des années 1970. Une histoire biblique, spirituelle, militante même, que Boney M. va transformer en l’un des plus grands succès de la musique populaire mondiale.
Aux origines : un psaume vieux de plus de 2 000 ans
Les paroles de Rivers of Babylon sont directement inspirées du Psaume 137 de l’Ancien Testament. Ce psaume raconte l’exil du peuple juif à Babylone après la destruction de Jérusalem : “By the rivers of Babylon, there we sat down, yea, we wept, when we remembered Zion.”
C’est un texte de nostalgie, de douleur et de résistance, où l’exilé refuse d’oublier sa terre et sa culture. Chanter devient ici un acte impossible, presque une trahison, tant la souffrance est vive. Le psaume est aussi un symbole universel de l’exil, de l’oppression et de la perte d’identité.
Ce thème trouvera un écho particulier plusieurs siècles plus tard dans les cultures afro-caribéennes.
The Melodians : la première mise en musique moderne
Avant Boney M., Rivers of Babylon est enregistrée en 1970 par le groupe jamaïcain The Melodians, figures majeures du reggae roots.
Leur version est profondément ancrée dans la culture rastafari, qui établit un parallèle direct entre Babylone, le monde occidental oppressif et Sion, l’Afrique, terre promise spirituelle.
Chez The Melodians, la chanson est lente, méditative, presque liturgique, portée par un reggae dépouillé. Elle devient rapidement un hymne spirituel et politique, bien connu dans le monde reggae, mais encore relativement confidentiel à l’échelle internationale.
Boney M. : la transformation disco inattendue
Tout change en 1978, lorsque Frank Farian, producteur et cerveau du projet Boney M., décide de reprendre Rivers of Babylon. Le pari est audacieux : transformer un chant biblique et reggae en tube disco-pop destiné au grand public.
La version de Boney M. se distingue par un tempo plus enlevé, des chœurs puissants et solennels, une production luxuriante typique de la fin des années 70 et une structure simple, immédiatement mémorisable.
Farian conserve l’essentiel du texte biblique, en y ajoutant des extraits du Psaume 19 (“Let the words of my mouth…”), renforçant encore la dimension spirituelle du morceau. Résultat : une chanson à la fois dansante, grave et universelle, chose extrêmement rare dans la pop.

Le groupe Boney M. en 1991 à Harlem. Crédit photo : Noord-Hollands Archief, collectie Fotopersbureau De Boer© – Fotopersbureau De Boer
Des paroles spirituelles… dans les charts
C’est l’un des grands paradoxes de Rivers of Babylon : une chanson parlant d’exil, de larmes et de mémoire collective devient un immense succès commercial.
Quelques chiffres éloquents :
Numéro 1 dans de nombreux pays européens
Plus de 2 millions de singles vendus au Royaume-Uni
L’un des singles les plus vendus de l’histoire du pays
Un succès massif en Allemagne, France, Suisse, Scandinavie
Le public, parfois sans en comprendre l’origine biblique, est touché par la gravité émotionnelle du morceau. La chanson dépasse les barrières religieuses et culturelles pour devenir un hymne universel à la nostalgie et à la dignité.
Rivers of babylon – les paroles
By the rivers of Babylon, there we sat down
ye-eah we wept, when we remembered Zion.
By the rivers of Babylon, there we sat down
ye-eah we wept, when we remembered Zion.
When the wicked
Carried us away in captivity
Required from us a song
Now how shall we sing the lord’s song in a strange land
When the wicked
Carried us away in captivity
Requiering of us a song
Now how shall we sing the lord’s song in a strange land
Let the words of our mouth and the meditations of our heart
be acceptable in thy sight here tonight
Let the words of our mouth and the meditation of our hearts
be acceptable in thy sight here tonight
By the rivers of Babylon, there we sat down
ye-eah we wept, when we remembered Zion.
By the rivers of Babylon, there we sat down
ye-eah we wept, when we remembered Zion.
By the rivers of Babylon (dark tears of Babylon)
there we sat down (You got to sing a song)
ye-eah we wept, (Sing a song of love)
when we remember Zion. (Yeah yeah yeah yeah yeah)
By the rivers of Babylon (Rough bits of Babylon)
there we sat down (You hear the people cry)
ye-eah we wept, (They need their God)
Pourquoi cette version a marqué l’histoire
La force de Boney M. tient à un équilibre unique : une musique accessible, un message ancien et profond, une interprétation collective, presque chorale et une absence totale de cynisme.
Contrairement à beaucoup de tubes disco de l’époque, Rivers of Babylon ne parle ni de fête ni de légèreté pure. Elle invite à la mémoire, au recueillement, tout en restant populaire. Peu de chansons peuvent se vanter d’avoir fait danser le monde sur un texte biblique sans le vider de son sens.
Une chanson hors du temps
Aujourd’hui encore, Rivers of Babylon continue d’être diffusée, reprise, chantée dans des contextes très variés : concerts, cérémonies, documentaires, playlists nostalgiques.
Elle rappelle que la musique populaire peut être porteuse d’histoire, de spiritualité et de transmission, sans perdre son pouvoir fédérateur.
Avec cette reprise, Boney M. n’a pas seulement signé un tube. Le groupe a offert au monde une passerelle entre la Bible, le reggae, le disco et la mémoire collective. Une rareté.
Crédit photo : Noord-Hollands Archief, collectie Fotopersbureau De Boer© - Fotopersbureau De Boer

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