Le 26 novembre 1974 : Simone Veil prononçait son discours pour dépénaliser l’avortement
Le 26 novembre 1974, Simone Veil, alors ministre de la Santé, prononçait un discours resté dans les annales de l’histoire française. Elle défendait devant l’Assemblée nationale le projet de loi dépénalisant l’avortement, un texte essentiel pour les droits des femmes en France. À l’occasion du 50ᵉ anniversaire de cet événement, revenons sur ce moment historique et sur ses répercussions pour les femmes françaises.
Un contexte social et politique tendu
Dans les années 1970, le droit à l’avortement était un sujet extrêmement sensible en France. Les femmes n’avaient alors que très peu de choix face à une grossesse non désirée. Les avortements clandestins, souvent réalisés dans des conditions insalubres, mettaient leur santé et leur vie en danger. Selon les estimations, près de 300 000 avortements illégaux étaient pratiqués chaque année, un chiffre alarmant qui soulignait l’urgence d’une réforme.
C’est dans ce contexte que Simone Veil, elle-même survivante de la Shoah et symbole de résilience, fut choisie par le président Valéry Giscard d’Estaing et son Premier ministre Jacques Chirac pour porter ce projet de loi controversé.
Le discours du 26 novembre 1974 : une épreuve politique
Le débat parlementaire, débuté le 26 novembre, fut marqué par une opposition virulente. Face à une Assemblée majoritairement masculine, Simone Veil s’exprime avec dignité et conviction. Elle déclare : “Aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l’avortement. Il suffit d’écouter les femmes. C’est toujours un drame et cela restera toujours un drame. Mais c’est un drame devant lequel il faut être à la hauteur.”
Elle appelle les députés à voter en faveur de la loi, non pas pour encourager l’avortement, mais pour encadrer cette pratique afin de protéger les femmes et leur donner un choix. Malgré les attaques personnelles, parfois cruelles, Simone Veil tient bon, incarnant la lutte pour une société plus juste.
La loi Veil : un texte fondateur
Le projet de loi est adopté le 17 janvier 1975, après d’intenses débats. Il dépénalise l’interruption volontaire de grossesse (IVG) sous certaines conditions : la femme doit être dans une situation de détresse et l’acte médical doit être réalisé dans un cadre légal et sécurisé.
Ce texte ne fut pas la fin des combats pour les droits des femmes, mais il posa une pierre angulaire. En 1982, sous François Mitterrand, la prise en charge financière de l’IVG par la Sécurité sociale renforce l’accès à ce droit. Enfin, en 2022, le droit à l’IVG est inscrit dans la Constitution, consacrant son caractère fondamental.
Un impact durable pour les femmes
La loi Veil a marqué une avancée décisive pour les femmes françaises. Elle leur a permis de disposer librement de leur corps, un pas crucial vers l’égalité des sexes. En encadrant l’IVG, la société a reconnu la capacité des femmes à prendre des décisions responsables concernant leur maternité.
Les chiffres montrent qu’aujourd’hui, environ 220 000 avortements sont pratiqués chaque année en France, soulignant que ce droit reste un besoin. Cependant, des inégalités territoriales persistent en matière d’accès à l’IVG, notamment dans les zones rurales.
Un héritage et des combats toujours actuels
Cinquante ans plus tard, le combat de Simone Veil résonne toujours. Dans un monde où les droits des femmes sont parfois remis en question, notamment dans certains pays, son courage et sa vision continuent d’inspirer. Le droit à l’avortement reste un symbole de l’émancipation féminine et de la lutte pour l’égalité. Cet anniversaire est l’occasion de célébrer le chemin parcouru tout en rappelant que la vigilance est nécessaire pour préserver ce droit fondamental.
Simone Veil, par son discours du 26 novembre 1974, a marqué à jamais l’histoire des droits humains en France. À l’heure où nous célébrons cet anniversaire, il est essentiel de continuer à défendre les valeurs de liberté, d’égalité et de respect qu’elle portait si haut.
Rappel historique de la loi dépénalisant l’avortement
26 novembre 1974 : Simone Veil prononce son discours historique défendant son projet de loi pour la dépénalisation de l’avortement à l’Assemblée nationale.
La loi relative à l’IVG est adoptée à titre expérimental le 20 décembre 1974, et confirmée cinq ans plus tard. L’IVG est alors autorisée pour les femmes s’estimant en situation de détresse dans un délai de 10 semaines de grossesse, sur demande à un médecin. Elle ne prévoit pas le remboursement par la Sécurité sociale mais une prise en charge sur demande au titre de l’aide médicale.
L’IVG est autorisée officiellement depuis la loi du 17 janvier 1975.
Des lois successives sont venues élargir le cadre de la prise en charge de l’IVG :
• Allongement du délai légal de l’IVG de 12 à 14 semaines de grossesse en 2022, après un passage de 10 à 12 semaines en 2001.
• Suppression du délai légal minimum de réflexion pour les mineurs comme les majeures en 2022.
• Autorisation des sages-femmes à pratiquer des IVG médicamenteuses en 2016.
• Suppression de la notion de détresse comme condition pour recourir à l’IVG en 2014.
• Prise en charge à 100 % des IVG par l’Assurance maladie.
En France, les conditions d’accès à l’IVG sont les suivantes :
• Seule la personne concernée peut en faire la demande.
• L’IVG est possible jusqu’à 14 semaines de grossesse (soit 16 semaines après le 1er jour des dernières règles).
• L’IVG est prise en charge à 100 % par l’Assurance maladie (avec dispense total d’avance de frais pour les femmes assurées sociales, les mineures et les bénéficiaires de l’aide médicale de l’État).
• Une mineure n’a pas besoin d’une autorisation parentale pour avorter mais doit être accompagnée d’une personne majeure de son choix.
• Il est possible de bénéficier d’un anonymat total pour cet acte.
• Il n’est pas nécessaire d’avoir la nationalité française pour avorter en France.
Crédit photo : Marie-Lan N’guyen©
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